jeudi 4 mars 2010

La ‘criminalisation’ de l’Islam dans la société américaine (suite)…extrait de mon livre en chantier, non-relu.

En 2008, quelques mois avant la présidentielle américaine, le sénateur Barack Obama que tout le monde présente déjà comme le favori à cette échéance entreprend un voyage dans le pays natal de son père, le Kenya. Dans le village de ses ancêtres, il est accueilli avec les honneurs dus à un dignitaire et il est habillé dans une tenue traditionnelle influencée par la culture de cette région de ce pays d’Afrique de l’Est. On le coiffe d’un turban plus proche de celui que portent les sikh que celui des musulmans, on lui fait porter un pagne et un boubou, des tenues vestimentaires en réalité plus inspirée de l’influence indo-hindoue de cette partie du Kenya ouverte sur le sous-continent indien avec lequel il y a des contacts séculaires plus anciens que la rencontre avec le monde arabo-islamique. Mais une bonne partie de la classe politique américaine peut-être pas très au fait des différentes cultures de la région -on va lui accorder le bénéfice du soute- assimile la tenue qu’on fait mettre à Barack Obama ce jour-là, avec son accointance avec l’Islam : un boubou, plus quelque chose sur la tête qu’est-ce que ça peut être d’autre qu’une tenue islamique. La photo prise lors de ce voyage, une sorte de retour aux sources très médiatisé ressurgit lors de la campagne pour la présidentielle, quand des adversaires du candidat démocrate veulent faire peur aux électeurs américains avec le slogan : ‘Allez-vous élire un musulman à la maison blanche’. Le raisonnement est similaire et rappelle des attaques lors d’élections précédentes pendant la période de la guerre froide où certains candidats se sont vu attribués le qualificatif de communistes ou encore de candidats de l’Union Soviétique. À la différence que si à ce moment-là les Etats-Unis étaient officiellement en guerre larvée et permanente contre les soviétiques, l’Amérique n’est pas en guerre contre l’Islam, du moins pas encore en tous cas, et peut-être qu’elle ne le sera jamais certainement. Les adversaires de Barack Obama fondent leur thèse sur des déclarations de dirigeants d’un des mouvements de libération de la Palestine occupée. En réponse à une question sûrement inspirée d’un journaliste, mais peut-être déplacée dans le contexte international d’alors, un des dirigeants du Hamas déclare que son candidat préféré pour la présidentielle de 2008, c’est Barack Obama. Un responsable du Hezbollah, parti politique libanais qu’on dit radical dira la même chose. C’est suffisant pour que les adversaires de monsieur Obama le présentent comme le candidat du Hezbollah et du Hamas, sans qu’on entende beaucoup de voix riposter avec une explication dont la simplicité n'enlève pourtant rien à sa pertinence: le fait pour quelqu’un de vous admirer ne fait pas de vous son ami, encore moins son allié. Mais on est surtout très attristé de ne pas avoir vu émerger à ce moment-là plus de commentaires intelligents insistant sur le fait que Barack Obama n’était pas que le candidat du Hamas et du Hezbollah, mais celui des dirigeants et de la classe politique européenne dans leur majorité, de l’ancien bloc de l’Est, de l’Asie, du Proche et du Moyen-Orient, de l’Afrique, de l’Amérique latine et même pour la première fois le vieux dirigeant cubain -Fidel Castro- avait un préféré : Barack Obama. On entend très peu d’analystes insister sur le fait que Barack Obama bénéficie de cette popularité planétaire moins par ce qu’on sait de lui, puisqu’on n’en savait que peu de celui qui quelques années avant les pré-campagnes était un parfait inconnu, tout comme il devait moins son aura à son look, à sa démarche et à l’expression de son visage un peu à la Denzel Washington, mais plus parce qu’il semblait incarner d’une certaine façon la rupture avec l’Amérique unilatéraliste et arrogante que les Bush, père puis fils, ont exhibé sans complexe ni état d’âme. Dans une espèce de mouvement d’inconscience généralisée, ailleurs dans le monde mais aussi certainement chez la plupart des américains qui l’exprimeront en votant pour lui, cet enfant né d’un père africain originaire d’un pays pauvre qui a connu une enfance normale ou plutôt modeste, ne peut pas être arrogant. Il ne peut pas narguer les autres. Il ne peut avoir pour option première de montrer ses muscles là où il pourrait user d’autres arguments pour convaincre, voire persuader s’il le faut. C’est donc vraisemblablement pour cela et pour rien d’autre que Barack Obama était le candidat préféré du Hamas et du Hezbollah tout comme il l’était pour plusieurs organisations et gouvernements dans le monde. Mais le plus choquant dans cette affaire c’est le silence avec lequel l’opinion américaine a accepté ce débat nauséabond sur l’islamité de Barack Obama, sans qu’aucun intellectuel ne demande depuis quand être musulman aux Etats-Unis était devenu un crime. Cependant cette campagne américaine pour la présidentielle de 2008, ne nous a pas fait découvrir que le crime d’être musulman, mais on s'est rendu compte aussi de ce qu’il en existe un autre : celui d’avoir été musulman à un moment de sa vie, d’avoir reçu une éducation musulmane, même dans son enfance.(à suivre)

dimanche 28 février 2010

La ‘criminalisation’ de l’Islam dans la société américaine (extrait de mon livre en chantier…non-relu)

Le 4 Juin 2009 à l’université égyptienne d’Al-Azhar au Caire, le président américain Barack Obama prononce un discours annoncé des semaines à l’avance et donc très attendu. Cette adresse est présentée comme une sorte d’acte fondateur des nouvelles relations entre la superpuissance américaine et le monde musulman. D’entrée, le locataire de la maison blanche présente le contexte dans lequel a lieu cette adresse. « Nous nous rencontrons à un moment de tensions entre les Etats-Unis et les musulmans dans le monde entier. Une tension dont les racines sont à rechercher dans les forces historiques qui vont au-delà de tout débat politique actuel. Les relations entre l’Islam et l’Occident inclus des centenaires de coexistence et de coopération, mais aussi de conflits et de guerres religieuses. Plus récemment, les tensions ont été entretenues par la colonisation qui a refusé les droits et les opportunités à beaucoup de musulmans, et la guerre froide pendant laquelle les pays à majorité musulmane ont toujours été traités comme mandataires sans aucun égard pour leurs aspirations. Plus encore, les changements apportées par la modernité et la globalisation ont poussé de nombreux musulmans à voir l’Occident comme hostile aux traditions de l’islam », une religion qui -je dois ajouter- se confond mal avec l’idée de l’accumulation sans égard pour l’environnement physique et humain, mais surtout qui considère la spéculation comme un pire péché ; des valeurs qui constituent le socle même du capitalisme sauvage qui gouverne aujourd’hui l’économie mondiale. Au-delà de cet état des lieux des relations entre les Etats-Unis et l’Occident d’une part et la communauté musulmane de l’autre, le président américain dans le même discours attire surtout l’attention sur l’exploitation que les groupes extrémistes font des problèmes de communication et même quelquefois de manque de respect mutuel et des tensions qui en résultent dans les relations entre l’Occident et le Monde islamique. « Des organisations violentes extrémistes ont exploité ces tensions au sein d’une petite mais forte minorité de musulmans. Les attaques du 11 Septembre 2001 et les efforts continus de ces extrémistes à s’engager dans les violences contre des civiles ont fait que certains dans mon pays voient l’Islam inévitablement comme hostile non seulement à l’Amérique et aux occidentaux, mais aussi aux droits de l’Homme. Ceci a entraîné plus de peur et de crise de confiance ». Le président américain évite volontairement certainement dans son propos de parler d’intolérance ou de montée du sentiment anti-musulman dans la société américaine. Un sentiment dont il a lui-même été victime pendant la campagne de l’élection présidentielle pour la simple raison qu’il est né de père musulman. Bien qu’aucune loi américaine ne criminalise l’appartenance à l’Islam, on a vu avec quelle dégelasse audace et en toute impunité certains des adversaires de Barack Obama l’ont poussé pendant la campagne à nier tout lien avec cette religion. (à suivre)